Robert Dussey réaffirme la souveraineté africaine et plaide pour une émancipation totale du continent
Dans un entretien accordé à Deutsche Welle, Robert Dussey, ministre des Affaires étrangères, de l’Intégration régionale et des Togolais de l’extérieur, a livré une analyse sans concession sur la place de l’Afrique dans le concert des nations. Défenseur d’un panafricanisme assumé, il a mis en avant la nécessité pour le continent de rompre avec les schémas de dépendance et de revendiquer pleinement son autonomie sur la scène internationale.
L’Afrique, maître de son destin
Le chef de la diplomatie togolaise a rejeté toute idée de soumission à l’aide extérieure, affirmant avec force que l’Afrique possède en elle-même les ressources et les capacités intellectuelles nécessaires à son développement. « Nous n’avons pas besoin d’aide. Nous sommes suffisamment intelligents pour construire nos pays et notre continent », a-t-il martelé, dénonçant une approche condescendante de certaines puissances étrangères qui perpétuent une vision d’assistance perpétuelle.

Robert Dussey a plaidé pour une transformation radicale de la perception de l’Afrique, qui doit être reconnue comme un acteur central et non comme une périphérie subordonnée aux décisions des grandes puissances. Il a insisté sur la nécessité de mécanismes concrets pour réparer les injustices historiques dont le continent a été victime, tout en valorisant ses immenses richesses naturelles et humaines.
Une interpellation aux puissances mondiales
Dans cette optique, le ministre togolais a invité l’Allemagne et d’autres grandes puissances à soutenir la dynamique d’émancipation du continent, tout en tirant les leçons de l’histoire. Il a rappelé que 140 ans après la Conférence de Berlin (1884-1885), qui avait consacré le partage colonial de l’Afrique, les répercussions de cet événement continuent d’influencer la place marginale du continent dans l’ordre mondial.
Selon lui, il est temps que les nations africaines reprennent la main sur leur destin en établissant des partenariats équitables, fondés sur le respect mutuel et la coopération gagnant-gagnant. Il a appelé les États africains à cesser d’attendre des solutions venues d’ailleurs et à privilégier des politiques économiques et diplomatiques basées sur leurs propres intérêts.
Une diplomatie de respect et de souveraineté
Interrogé sur les tensions en Afrique de l’Ouest, notamment au Sahel avec la création de l’Alliance des États du Sahel (AES) par le Mali, le Niger et le Burkina Faso, Robert Dussey a rappelé que chaque pays est souverain dans ses choix stratégiques et politiques. « Ces pays ont décidé de se regrouper dans une alliance. En tant que ministre des Affaires étrangères du Togo, je respecte leur souveraineté », a-t-il affirmé.
Il a dénoncé l’ingérence de certaines puissances étrangères qui tentent d’imposer des schémas politiques aux nations africaines, insistant sur le fait que ces interventions sont souvent sources d’instabilité et de tensions prolongées.
Par ailleurs, il a critiqué la nomination par les grandes puissances de représentants spéciaux pour les régions africaines, une pratique qu’il juge paternaliste et inacceptable. « Depuis quand avez-vous vu l’Afrique nommer un représentant pour l’Europe de l’Est ou du Nord ? » a-t-il interrogé avec vigueur, soulignant l’urgence de repenser les relations internationales sur des bases plus égalitaires.
Le Togo, fer de lance d’un panafricanisme moderne
Fidèle à cette vision d’une Afrique forte et unie, le Togo s’apprête à accueillir un congrès panafricain qui réunira plusieurs pays du continent autour d’une vision commune pour l’avenir. Cet événement, voulu comme un cadre de réflexion stratégique, vise à renforcer la coopération intra-africaine et à définir des actions concrètes pour affirmer l’indépendance économique et politique du continent.
Robert Dussey a conclu son entretien en réaffirmant la détermination du Togo à œuvrer pour une Afrique respectée et autonome. « Nous voulons une Afrique respectée comme continent. Personne n’est supérieur à nous. Nous devons parler et agir sur un pied d’égalité », a-t-il déclaré.
Avec cette prise de position forte, le Togo s’inscrit dans la lignée des États africains qui refusent la marginalisation et revendiquent un rôle actif dans la gouvernance mondiale. Loin d’une posture idéologique, cette approche pragmatique vise à construire un avenir où l’Afrique ne sera plus un objet de convoitise, mais un acteur incontournable du développement global.
AA