Aoufoh Botchi Touré, nouvelle victime de la répression des voix dissidentes au Togo
À l’approche de chaque fête de l’indépendance, la tradition démocratique voudrait que les leaders politiques, les faiseurs d’opinion et les citoyens s’expriment librement sur le chemin parcouru par la nation, les défis à relever et l’avenir à construire. Au Togo, cet espace de parole se heurte toutefois à une réalité bien différente : les voix critiques, loin d’être écoutées, sont systématiquement réduites au silence par un pouvoir qui use de méthodes d’un autre âge.Cette methode a encore fait parler d’elle lors des emissions du 27 avril 2025.
M. Aoufoh Botchi Touré, invité de l’émission Club de la presse animée par Pascal Lossou, en est aujourd’hui la parfaite illustration. Sans détour, il a, à trois reprises, tenu des propos jugés virulents à l’égard du régime en place. Le 18 avril 2025, il lançait : « Depuis 58 ans, quelle stratégie le RPT-UNIR a ? L’armée n’a qu’à s’éloigner de la politique et on verra. » Le 22 avril, il poursuivait : « Je croirai à vos évaluations lorsque le Togo aura un nouveau régime, et qu’alors seulement on pourra véritablement évaluer. » Enfin, le 28 avril, en lien avec le 65ᵉ anniversaire de l’indépendance, il déclarait : « Tant que ce régime sera au pouvoir, les fêtes se passeront ainsi. Le Ghana, lui, respecte son peuple et ne modifie pas sa constitution à minuit pendant que le peuple dort. »
Ces propos, somme toute légitimes dans un cadre démocratique, lui ont valu d’être activement recherché. Depuis lors, il est porté disparu, un sort tristement familier pour ceux qui osent braver les lignes rouges fixées par le régime de Lomé. Cette traque s’inscrit dans une longue tradition de méthodes soldatesques, où l’armée et les forces de sécurité sont instrumentalisées pour intimider, arrêter ou réduire au silence toute voix discordante.
Le cas de M. Aoufoh s’ajoute à une liste déjà longue. D’autres citoyens ayant exprimé des opinions similaires croupissent dans les geôles du pays ou dans des lieux de détention secrets. Plusieurs journalistes critiques, quant à eux, n’ont eu d’autre choix que l’exil pour continuer à exercer leur métier sans craindre pour leur liberté ou leur vie. Cette fuite forcée des plumes indépendantes appauvrit davantage l’espace médiatique togolais et alimente un climat de peur généralisé.
Alors que le pays s’apprête à franchir le cap de la Vᵉ République, la répression des voix discordantes contraste violemment avec les idéaux de liberté et de démocratie que l’indépendance aurait dû consacrer. La disparition inquiétante de M. Aoufoh est révélatrice d’un régime qui, au lieu d’ouvrir la voie à un débat national sincère, préfère museler les critiques par la peur et la coercition.
Une question s’impose dès lors : quelle valeur peut encore avoir l’indépendance d’un État lorsque ses propres citoyens ne peuvent en débattre librement, sans craindre la prison, l’exil ou la disparition
LA REDACTION