Patrick Motsepe : entre gestion de la CAF et intérêts personnels présumés
L’affaire opposant la Confédération Africaine de Football (CAF) et le groupe togolais New World TV (NWT), titulaire des droits de diffusion des compétitions africaines jusqu’en 2025, soulève des interrogations majeures sur la gouvernance au sein de la CAF. Derrière les tensions apparentes se profile une question délicate : Patrick Motsepe, président de la CAF, est-il juge et partie dans ce dossier ?
Des enjeux financiers stratégiques
Les droits de diffusion des compétitions africaines représentent un levier économique crucial pour la CAF, confrontée à des défis financiers importants. En 2021, Motsepe a hérité d’une institution en déficit de 40 millions de dollars. Redresser les finances de la CAF était donc une priorité pour son premier mandat, et la signature d’accords lucratifs avec des diffuseurs s’inscrivait dans cette stratégie.

Cependant, la mise en cause de New World TV, accusée implicitement de ne pas répondre aux attentes de la CAF, a suscité des soupçons quant aux réels objectifs du président de l’organisation. Ce bras de fer semble refléter une tentative de repositionnement stratégique qui profiterait indirectement à des partenaires ou des intérêts proches de Motsepe.
Un positionnement ambigu avec Canal+ et MultiChoice
Patrice Motsepe est aussi impliqué dans des transactions d’envergure en dehors de son rôle à la CAF. Sa possible participation au rachat de MultiChoice par Canal+ soulève des questions sur un éventuel conflit d’intérêt. MultiChoice, opérateur de DStv, est un acteur majeur de la télévision payante en Afrique, notamment en zone anglophone. Si ce rapprochement avec Canal+ aboutit, il pourrait donner au groupe un avantage compétitif significatif dans la diffusion des compétitions africaines.
Dans ce contexte, il est légitime de se demander si les décisions prises par la CAF, sous la direction de Motsepe, visent uniquement à servir les intérêts du football africain ou si elles cachent une volonté de favoriser indirectement un futur partenariat commercial dans lequel il pourrait jouer un rôle clé.

Une gouvernance contestée
Depuis son accession à la présidence de la CAF, Patrice Motsepe a fait face à plusieurs critiques liées à des pratiques de gestion jugées opaques. L’affaire New World TV s’inscrit dans cette continuité et met en lumière une gestion potentiellement partiale des conflits contractuels. Alors que le groupe togolais cherche à défendre ses droits, il se heurte à une position inflexible de la CAF, qui pourrait être influencée par des intérêts externes.
Le fait que Motsepe se prépare à briguer un second mandat alimente également les soupçons. La volonté d’afficher un bilan financier positif pourrait expliquer certaines décisions controversées, comme l’éventuelle remise en cause des accords avec New World TV, dans l’espoir d’obtenir des revenus plus élevés avec d’autres diffuseurs potentiels.
La nécessité d’une régulation indépendante
Cette affaire met en évidence l’urgence de garantir une gestion transparente et indépendante au sein de la CAF. Les droits de diffusion des compétitions africaines doivent être gérés dans l’intérêt exclusif du football continental, sans interférence de considérations personnelles ou commerciales. Une régulation plus stricte, incluant des audits externes indépendants, serait essentielle pour prévenir tout conflit d’intérêt.

Un impact à long terme pour le football africain
Si les suspicions de conflit d’intérêt sont avérées, elles pourraient avoir des conséquences néfastes pour la crédibilité de la CAF et pour le développement du football africain. Une gestion partiale des droits de diffusion risque non seulement de limiter les ressources financières disponibles pour les fédérations membres, mais aussi de ternir l’image du football africain sur la scène internationale.
juge et partie ?
L’attitude de Patrick Motsepe dans l’affaire New World TV-CAF laisse planer le doute sur son impartialité. Les liens apparents entre ses activités commerciales personnelles et les décisions de la CAF accentuent la perception d’un conflit d’intérêt latent. Dans un contexte où la gouvernance sportive en Afrique nécessite plus que jamais de la transparence et de la responsabilité, cette affaire pourrait bien devenir un test déterminant pour la CAF et pour le président qui aspire à un second mandat.
Adam Adjronou