Unoc3 à Nice : l’océan au cœur du multilatéralisme mondial

 

Après New York en 2017 et Lisbonne en 2022, la troisième Conférence des Nations unies sur l’océan (Unoc3) s’ouvre à Nice, du 9 au 13 juin, sous l’égide conjointe de la France et du Costa Rica. Cet événement non décisionnel mais hautement stratégique vise à dynamiser les engagements en faveur de l’Objectif de développement durable (ODD) n°14, consacré à la préservation et l’exploitation durable des océans.

Un rendez-vous multilatéral d’envergure

Quelque 10 000 participants issus de 167 pays, dont une soixantaine de chefs d’État, sont attendus sur la Côte d’Azur. Si l’Unoc ne se clôture pas par un accord contraignant, elle ambitionne néanmoins d’imprimer une dynamique politique forte en matière de gouvernance océanique. L’accent est notamment mis sur l’adoption effective du traité international BBNJ (Biodiversity Beyond National Jurisdiction), clé de voûte de la protection de la haute mer. À la veille de la conférence, le président Emmanuel Macron a confirmé que le seuil des 60 ratifications serait franchi d’ici septembre, ouvrant la voie à l’entrée en vigueur du texte, considéré comme un marqueur de réussite de la conférence.

Des engagements encore fragiles

Malgré une prise de conscience croissante, les progrès restent insuffisants. L’ODD 14, adopté en 2015, prévoit des cibles précises, telles que l’élimination des subventions à la pêche illégale ou la réduction significative de la pollution marine d’ici 2025. Mais l’action des États demeure en-deçà des ambitions. Le financement aussi fait défaut : seuls 25 milliards de dollars sont investis chaque année, loin des 175 milliards jugés nécessaires par le Forum économique mondial.

Une pression croissante de la société civile

ONG, scientifiques, représentants autochtones et entreprises, réunis pour cette semaine diplomatique, exercent une pression constante sur les gouvernements pour faire avancer des dossiers majeurs : pollution plastique, moratoire sur l’exploitation minière des fonds marins, lutte contre la pêche illégale, ou encore création d’aires marines protégées dans le cadre de l’objectif « 30×30 » (protéger 30 % des océans d’ici 2030).

L’océan dans le tourbillon diplomatique mondial

L’Unoc3 se veut également tremplin vers d’autres arènes multilatérales, comme la COP30 climat prévue en novembre au Brésil. La présence du président Lula en ouverture traduit cette volonté de synergie. Si les grandes puissances comme les États-Unis sont représentées à un niveau moindre, Paris insiste sur l’importance d’avancer avec les partenaires engagés. « Le multilatéralisme océanique reste vivant », affirme Serge Ségura, ancien ambassadeur de l’océan, qui souligne l’existence d’une diplomatie spécifique autour de la pêche et des ressources marines.

Une déclaration et un plan d’action controversés

La conférence devrait déboucher sur une déclaration politique finale, qualifiée d’« ambitieuse » par ses rédacteurs mais jugée « décevante » par plusieurs ONG, dont Greenpeace, qui dénoncent une absence de langage fort sur la pollution plastique et l’exploitation minière des grands fonds. Parallèlement, un « Plan d’action de Nice » compilera les engagements volontaires des États, outil non contraignant mais potentiellement utile pour suivre les avancées.

Un sommet, un symbole

Loin de se limiter aux négociations officielles, l’Unoc3 met en lumière la diversité des acteurs engagés pour un avenir océanique durable. Pour Olivier Poivre d’Arvor, ambassadeur de l’océan et cheville ouvrière de l’événement, cette conférence pourrait devenir pour l’océan ce que l’Accord de Paris représente pour le climat. Si elle ne produit pas de décision contraignante, elle offre une tribune mondiale pour rappeler, avec force, que sans un océan sain, la vie sur Terre est en péril.

Ing Ilyame OURO-LOWAN

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