Suspension de France 24 et RFI au Togo /LES Raisons d’une suspension à risque 

Au Togo, la suspension pour trois mois des médias français RFI et France 24, annoncée ce lundi 16 juin 2025 par la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC), soulève une multitude d’enjeux liés et au contexte politique et social sensible du pays. Si la décision du régulateur peut trouver un certain fondement dans les exigences de rigueur journalistique, elle interroge également sur les effets inverses que pourrait provoquer une telle mesure dans l’espace médiatique national et international.

Les raisons officielles : encadrer sans museler

Selon la HAAC, cette suspension se justifie par des manquements répétés des deux chaînes à l’impartialité et à la vérification rigoureuse des faits. Certaines émissions auraient diffusé des propos jugés tendancieux, inexacts, voire contraires à la réalité, dans un contexte déjà marqué par quelques tensions.  

Ceci étant, il est compréhensible que les autorités cherchent à éviter l’amplification des tensions à travers des discours médiatiques susceptibles d’attiser la défiance envers les institutions. Dans un climat saturé d’invectives et de contenus viraux sur les réseaux sociaux, la responsabilité éditoriale des  médias est scrutée à la loupe, notamment lorsque leurs contenus sont repris massivement par des influenceurs, parfois sans nuance ni contextualisation.

La HAAC entend ainsi rappeler que la liberté de la presse, si elle est un pilier démocratique fondamental, ne saurait être assimilée à un droit absolu d’informer sans filtre ni responsabilité. En ce sens, cette mesure s’inscrit dans une logique de régulation visant à préserver la cohésion sociale et la souveraineté narrative d’un État.

Un précédent dans la sous-région : les absents toujours présents

Le cas togolais n’est pas isolé. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont également suspendu France 24 et RFI ces dernières années, souvent pour des motifs similaires, notamment l’accusation de relayer des récits biaisés ou de véhiculer des opinions hostiles. Or, ces suspensions n’ont en rien réduit l’influence de ces deux médias dans la perception internationale de la situation dans ces pays.

Paradoxalement, ces chaînes, bien qu’officiellement absentes, n’en sont pas moins omniprésentes : leurs contenus sont toujours accessibles en ligne, diffusés sur les réseaux sociaux ou relayés par des plateformes alternatives. Le risque, au Togo comme ailleurs, est donc de créer un vide d’information institutionnelle, que d’autres acteurs — parfois peu soucieux d’exactitude — pourraient exploiter pour occuper l’espace.  

Un équilibre délicat à maintenir

La suspension de France 24 et RFI au Togo, bien que justifiée par la nécessité de protéger la stabilité nationale et l’éthique journalistique, interpelle sur les dérives potentielles d’une régulation excessive.  

Somme toute, cette suspension pourrait indirectement ouvrir la porte à des narratifs incontrôlés.  

LA REDACTION

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