Financer le développement des collectivités locales par des impôts exclusivement locaux
Il existe dans la nomenclature des impôts et taxes collectés par l’Office Togolais des Recettes OTR au profit de l’Etat et des collectivités locales des impôts 100 % locaux. Pendant longtemps, ces impôts dits affectés comme la taxe d’habitation et la taxe foncière ont connu une faible mobilisation que nous pouvons attribuer à la non effectivité de la décentralisation au Togo et une insuffisance d’organisation de l’administration fiscale. L’avènement de l’Office Togolais des recettes (OTR) et la communalisation du Togo indiquent à quel point il était nécessaire d’arriver à une mobilisation maximale si tel est qu’on veut maintenir l’élan de développement sur la base d’une autonomie financière des collectivités locales. Mais une telle propension nécessite une mobilisation générale en s’accordant sur un idéal commun : mutualiser nos efforts pour améliorer davantage la mobilisation des ressources par l’OTR.
L’avènement des communes au Togo dont l’objectif est de mieux planifier et conduire le développement à la base a suscité beaucoup d’espoir avec pour finalité de mieux canaliser la mobilisation des ressource en difficulté. Une contribution pas des moindres est attendue des communes à qui reviennent la totalité des impôts affectés et la moitié ou un pourcentage des impôts en partage. Les mairies devraient permettre de mieux organiser les populations à mobiliser la taxe d’habitation, aider à l’immatriculation foncière tout en dégageant des réserves administratives qui vont abriter plus tard des infrastructures communautaires de développement. Afin d’outiller les services de recouvrement des communes, la direction de la communication et des services aux usagers de l’OTR ne cesse de multiplier des activités de sensibilisation en leur faveur et en direction des contribuables. En témoignent les formations des élus locaux sur la citoyenneté fiscale et des émissions télévisées et radiophoniques organisées sur tout le territoire.
Malheureusement trois ans après leur installation, on ne ressent pas encore de façon significative les effets de la grande campagne de sensibilisation de l’OTR en faveur d’une culture fiscale responsable sur les budgets locaux des mairies. Au début de l’annonce relative à la collecte de ces taxes chez l’ensemble des citoyens certains contribuables ont exprimé leurs hostilités par rapport à l’acquittement de ces taxes foncières et d’habitation. Même si on note une petite prise de conscience des contribuables par rapport à leur participation au développement de leur localité, la valeur des recettes fiscales ne la démontre pas. Pour lever les ambiguïtés et les incompréhensions, une forte implication des maires est requise. La patente, la taxe professionnelle unique TPU, la taxe d’habitation et la taxe foncière peuvent si elles sont mobilisées auprès de la majorité des contribuables de chaque commune, financer le développement des communes et alimenter le fond d’appui aux collectivités locales. Une forte action des maries qui en sont des bénéficiaires est requise.
Les Mairies, une solution à la collecte de la taxe d’habitation dans toute sa plénitude
Selon le Chef service communication de l’OTR M. Saturnin Noamessi, la taxe d’habitation n’est pas une réforme, elle existait depuis des décennies. C’est une taxe qui est affectée à 100% aux budgets des collectivités locales. La recette collectée est entièrement versée au trésor public par l’OTR et qui se charge de les verser à son tour aux collectivités locales.
Au regard de son utilité, il convient de rappeler qu’une bonne partie des concessions ne semblent pas être concernée par cette taxe. Si l’Office Togolais des Recettes (OTR) est chargé de collecter toutes les ressources contenues dans la loi de finance, il n’en demeure pas moins que les bénéficiaires finaux jouent leur partition pour lever les barrières d’hostilités et les réticences qui freinent l’adhésion de tous à sa mobilisation. S’exprimant sur le sujet, le maire de Golfe2, Dr James Amaglo a fait remarquer que la taxe d’habitation est une mine d’or partout dans le monde pour le développement des communautés à la base .Ce sont des taxes à la portée de tous. C’est un montant forfaitaire qui va directement aux communes pour la réalisation des infrastructures sociales communautaires. Aujourd’hui, elle est payée par les entreprises et autres contribuables qui se sont formalisés. Des mesures incitatives sont mis en œuvre pour pousser les fonctionnaires et les conseillers et autres à s’acquitter de cette taxe qui faut-il le rappeler n’est pas nouvelle au Togo. Mais, ici, il est question d’amener chaque concession à s’acquitter de cette taxe qui est appliquée de facto seulement aux grands immeubles .Selon lui c’est une injustice car l’acquittement de cette taxe ne devra pas se faire sur la base de la qualité des immeubles. Des sensibilisations ont débuté dans sa commune pour amener les uns et les autres à une convergence de vue et inciter chacun et tout le monde à un nouveau regard sur cette taxe. Selon lui, la balle est dans le camp des maires qui doivent montrer patte blanche dans la gestion des ressources allouées et utiliser les infrastructures réalisées comme des faits pouvant inciter la population. « Nous sommes dans un processus d’utilisateur payeur, l’utilisation des infrastructures socio collectives n’a pas de distinction parmi les usagers. Leur dégradation et bien évidemment leur réhabilitation est l’affaire de tous » a-t-il fait remarquer.
Le maire de Golfe7, M. Aimé Djikounou a, pour sa part, mis en place un processus qui permet d’inciter les immeubles plus modernes à s’acquitter de cette charge tout en procédant à la sensibilisation des bâtis modestes à comprendre le bien-fondé de l’acquittement de cette charge. En dépit de la faible mobilisation de ces impôts, les autorités du pays ont pris sur eux de financer des dépenses d’investissement des collectivités locales par le Fonds d’Appui aux Collectivités (FACT) depuis 2020 sur le budget général de l’Etat. Le gouvernement a confié la gestion de la moitié de ce fonds à l’ANADEB pour la réalisation des dépenses d’investissement.
Que comprendre du statut de maitre d’ouvrage des infrastructures d’ANADEB dans les communes ?
Le Fonds d’appui aux collectivités territoriales (FACT) d’une valeur de 6,250 milliards de FCFA est instauré par le gouvernement togolais en octobre 2019.Il est destiné à l’ensemble des 117 communes du pays et devrait permettre à chacune d’elles de planifier et réaliser des actions de développement dans sa commune. Sa répartition est faite sur la base de la population, la superficie et l’indice de pauvreté.
Après quelques années d’expériences, il s’est avéré que sa gestion a rencontré des difficultés obligeant le gouvernement à faire intervenir l’Agence Nationale d’Appui au Développement à la Base (ANADEB). Le Fonds d’appui aux collectivités locales est versé aux communes chaque trois mois .C’est une partie de ce fonds qui est utilisée par l’ANADEB pour la réalisation des infrastructures socio collectives identifiées par les mairies elles-mêmes comme prioritaires.
M. Gnatsé expert en décentralisation et chargé des relations entre la préfecture d’Agoè Nyivé et l’ANADEB expliquant le mécanisme du choix des projets a estimé que ‘’Ceci part des discussions entre l’ANADEB, la mairie et son conseil municipal notamment l’organe délibérant composé de tous les conseillers municipaux et l’organe exécutif composé du maire et son adjoint ou ses adjoints suivant la taille de la commune .Ils identifient les projets phares de la commune qu’ils soumettent à l’ANADEB qui utilise une partie des fonds du FACT alloués à la mairie pour réaliser ces projets .Il est revenu sur les notions de coopération des mairies togolaises entre elles et celle avec les pays étrangers. Les notions de coopération décentralisée ou de jumelage, ou d’intercommunalité sont un arsenal de développement des communes parce qu’elles permettent des partages d’expériences et créent l’émulation dans la gestion de la municipalité.
Selon lui, la coopération décentralisée ou le jumelage c’est quand plusieurs communes se mettent ensemble pour solutionner des questions de développement. Ils mettent en place un bureau qui connait des instances de gouvernance rotative entres elles (article 33 de la loi sur la décentralisation et des libertés locales.
Les Mairies, actrices clé dans la mise en œuvre des reformes foncières et la sauvegarde du patrimoine foncier administrative
Au Togo, le foncier a toujours constitué une préoccupation majeure non seulement de la population mais également des gouvernants. Ceci a amené le pays à s’engager dans un profond processus de réformes et de modernisation du domaine foncier.
Les conflits de délimitation dans bon nombre de cas, constituent un véritable frein à la mobilisation des ressources et par ricochet ,au développement des communes .Au regard de cette réalité conflictuelle et la place centrale qu’occupe le foncier dans toute action de développement, le gouvernement n’a ménagé aucun effort pour mettre en place une politique de régulation de l’accès au foncier posant de facto le problème de l’immatriculation foncière. Cette politique s’est concrétisée par l’adoption de la loi numéro 2018-005 du 14 juin 2018, portant code foncier et domanial. L’avènement des mairies est une aubaine pour le gouvernement de mieux cadrer cette politique tout en dotant et préservant les domaines de l’Etat appelés les réserves administratives.
Le Préfet d’Agoè Nyivé le Colonel Awaté a estimé que ; « Avec la communalisation intégrale du Togo, les communes sont devenues aujourd’hui des acteurs clés de la réforme foncière.
Parlant de la contribution des communes dans les réformes du foncier au Togo, le préfet a estimé que les maires doivent travailler à l’appropriation du code foncier et domanial par les élus locaux et les autres leaders d’opinion à la base que sont les CVD, CDQ, la chefferie traditionnelle. sensibiliser les acteurs majeurs du foncier en l’occurrence géomètre et mandataires des collectivités ainsi que toute la population sur les dispositions du code foncier et domanial ;encourager les collectivités à la conciliation en matière de litiges ;sécuriser les réserves administratives existantes dans les zones approuvées par les plaques de signalisation ;exiger les certificats de donation des collectivités sur les réserves administratives dans les zones non approuvés en attendant l’approbation. Ils doivent se référer aux services du ministère en charge de l’urbanisme et de l’habitat.
C’est à ce seul prix que les acteurs locaux du développement pourront empêcher le non-respect du bien public de se développer à côté de l’incivisme fiscal qui handicape déjà une bonne mobilisation des recettes fiscales. Car il ne suffit pas seulement d’avoir des recettes en caisse et manquer d’espaces pour l’installation des infrastructures de développement. Une nouvelle mairie dont les acteurs ignoreraient la sensibilisation comme moyen principal d’action, aura du mal à réaliser ses ambitions de développement. Ce n’est que par d’intenses communications qu’il faut amener les géomètres et les propriétaires des terrains à réserver des terrains à l’Etat lors des lotissements et surtout à ne pas les revendre après.
Le maire de Golfe7, M. Aimé Djikounou s’exprimant sur les difficultés sur l’immatriculation foncière a estimé que les difficultés sont énormes. « Les domaines administratifs ont déjà des titres fonciers détenus par un acquéreur lorsque vous voulez les exploiter. Et lorsque vous exigez des documents de rétrocession, on ne les fourni jamais ». Il met en cause le service du cadastre qui quelque part n’a pas fait tous les recoupements possibles avant l’immatriculation. Ce qui rend difficile la gestion des dossiers pendant devant les maires. Selon lui, un travail de sensibilisation est en cours dans sa commune et prend en compte tous les démembrements structurels de développement à la base : les communautés de développement du quartier, les comités villageois de développement, les chefs traditionnels. Tout part de là, si la base est faussée, il sera difficile aux autorités communales de trouver des solutions.
A son niveau, un bureau est mis en place pour accueillir les dossiers des acquéreurs de terrains dans sa commune, les étudier et voir leur conformité administrative. L’intérêt c’est de faire doter la commune de réserves administratives pouvant servir à la construction d’infrastructures sociales et collectives.
Vivement que le contribuable comprenne que l’accroissement de la population et l’extension de nos agglomérations nécessitent de nouvelles infrastructures et la réhabilitation des anciennes. Ceci nous interpellent à plus d’un titre à nous mobiliser davantage aux cotés de l’OTR pour améliorer ses recettes.